De la difficile répartition des pouvoirs entre les juges judiciaire et administratif en cas de licenciement d’un salarié protégé


Dans un arrêt du 5 janvier 2022 (n° 20-12.471), la Cour de cassation rappelle qu’en vertu du principe de la séparation des pouvoirs, la question de la légalité des actes administratifs relève de la compétence du juge administratif. 

De ce fait, lorsque dans un contentieux judiciaire se pose une question sur la légalité d’un acte administratif, le juge judiciaire doit sursoir à statuer et transmettre une question préjudicielle au juge administratif. 

Toutefois, la Cour de cassation réaffirme que lorsqu’il apparait manifestement, au regard d’une jurisprudence établie du juge administratif, la légalité ou l’illégalité de l’acte administratif, la contestation peut être accueillie par le juge judiciaire. 

En l'occurrence, un inspecteur du travail saisi d'une demande d'autorisation de procéder à un licenciement s'était déclaré incompétent.

Il estimait que le salarié, délégué syndical, n'exerçant plus ses fonctions depuis plus d'un an (il avait été reconnu en invalidité), les conditions requises à l'article L. 2411-3 du code du travail pour prétendre à la protection post-mandat n'étaient pas remplies.

Par conséquent, le salarié ne bénéficiait plus de la protection inhérente à sa désignation et fut licencié sans autorisation.

La Cour d'appel a considéré la décision d'incompétence rendu par l'inspection du travail comme étant manifestement illégale et a annulé le licenciement prononcé.

La Cour de cassation a, quant à elle, considéré que la décision de l'inspection du travail rendait nécessaire une interprétation de la décision administrative et une analyse de la situation de fait du salarié, ce qui était incompatible avec la notion d'illégalité manifeste et a cassé l'arrêt de la Cour d'appel, considérant qu'elle aurait dû surseoir à statuer.

La Cour de cassation s'est également prononcée sur le fond en raison de la portée et des conséquences de la cassation, considérant que la demande de dommages intérêts en réparation du préjudice subi formée par le salarié n'était pas justifié car une telle demande ne pouvait être formée que si la cause de l'illégalité de la décision administrative d'incompétence était la conséquence d'une faute de l'employeur, ce qui n'était pas le cas en l'espèce.

Elle précisait également que les prétentions du salarié qui visaient à voir reconnaître par voie d'exception l'illégalité de la décision administrative devaient être considérées comme étant sans objet.