Préjudice d’anxiété des travailleurs exposés à l’amiante : point de départ du délai de prescription et application limitée à des métiers spécifiques


Par un arrêt du 28 février 2024 (n°22-22.233) la chambre sociale de la Cour de cassation juge que la publication d'un arrêté d'inscription d'un établissement sur la liste des établissements de construction et de réparation navales ne constitue le point de départ du délai de prescription de l'action en réparation du préjudice d'anxiété qu'à l'égard des salariés de la construction et de réparation navale ayant exercé, dans cet établissement, un métier figurant sur la liste des métiers prévus par l'article 41 2° de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998.
 
Dans l'affaire en question, des arrêtés successifs relatifs au même site avaient été publiés. Les salariés observaient qu’un arrêté du 23 octobre 2014 concernait l'ensemble des salariés du site tandis que les arrêtés initiaux concernaient exclusivement les salariés affectés à la réparation navale lorsqu'ils avaient exercé un des métiers listés à ce titre.
 
La cour d'appel a jugé que les salariés ne pouvaient pas faire valoir leur demande de réparation pour préjudice d'anxiété car l'établissement où ils travaillaient avait été désigné comme relevant du régime de l'allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (ACAATA) le 3 juillet 2000, sans restriction particulière, selon l'arrêté publié au Journal officiel. Les juges ont estimé que le délai de prescription avait débuté à partir de la publication de cet arrêté le 7 juillet 2000, date à laquelle les salariés ont été informés du risque à l'origine de leur anxiété. En effet, La Cour de cassation a déjà jugé que le salarié qui bénéficie de l’ACAATA a connaissance du risque à l’origine de son anxiété à partir de la date de publication de l’arrêté ministériel qui a inscrit l’établissement sur la liste permettant la mise en œuvre de ce régime légal spécifique. C’est à partir de cette date que commence le délai de prescription pour l’action en réparation du préjudice d’anxiété (Cass. soc., 29 janv. 2020, n° 18-15.396).
 
La Cour de cassation précise aujourd’hui que cette règle ne s’applique qu’aux salariés de la construction et de la réparation navale qui ont exercé, dans l’établissement concerné, un métier figurant sur la liste des métiers prévus par l’article 41 2° de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998.
 
Autrement dit, le délai pour demander réparation pour le préjudice d’anxiété lié à l’exposition à l’amiante commence à partir de la date de publication de l’arrêté qui inscrit un établissement sur la liste des établissements de construction et de réparation navales. Cependant, cela ne concerne que les salariés de ces établissements qui ont exercé un métier spécifique figurant sur une liste établie par la loi.
 
La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel, en pointant que l’établissement n’avait été inscrit pour la première fois sur la liste des établissements de fabrication de matériaux contenant de l’amiante que par arrêté du 23 octobre 2014. C’est donc à cette date que les salariés de l’établissement qui ne relevaient pas des métiers de la construction et de la réparation navales ont eu connaissance du risque à l’origine de leur anxiété.