Le refus de l’association de garantie des salaires de prendre en charge les créances engendrées par une prise d’acte justifiée n’est pas conforme au droit de l’Union européenne
Par un arrêt du 22 février 2024 (C-125/23), la Cour de Justice de l’Union européenne juge qu’une institution de garantie de paiement des salaires (AGS en France) ne peut exclure de la garantie les sommes résultant d’une pris d’acte d’un salarié, reconnue comme justifiée.
La Cour d’appel d’Aix-en-Provence a, par une décision du 24 février 2023, introduit une demande de décision préjudicielle afin de savoir si une institution de garantie de paiement de salaires, qui intervient lorsqu’un employeur est dans une procédure d’insolvabilité, peut exclure de la garantie les sommes qui résultent d’une prise d’acte d’un salarié, reconnue comme justifiée.
En l’espèce, une entreprise fait l’objet d’une liquidation judiciaire, et plusieurs salariés décident de prendre acte de la rupture de leur contrat de travail en raison de divers manquements reprochés à leur employeur.
Le tribunal prud'homal juge que ces résiliations de contrat sont justifiées, les considérant comme équivalentes à des licenciements sans cause réelle et sérieuse. Les compensations dues sont alors enregistrées comme dettes de l'entreprise en liquidation. Cependant, l'Association pour la Gestion du régime de Garantie des créances des Salariés (AGS) refuse de prendre en charge ces créances découlant de ces résiliations.
Le tribunal prud'homal juge que ces résiliations de contrat sont justifiées, les considérant comme équivalentes à des licenciements sans cause réelle et sérieuse. Les compensations dues sont alors enregistrées comme dettes de l'entreprise en liquidation. Cependant, l'Association pour la Gestion du régime de Garantie des créances des Salariés (AGS) refuse de prendre en charge ces créances découlant de ces résiliations.
La CJUE considère que ce refus de prise en charge n’est pas conforme au droit de l’Union européenne. Elle explique que la résiliation de contrat spécifique à cette situation, motivée par les manquements de l'employeur, ne traduit pas une volonté réelle du salarié de quitter son poste, mais une volonté contrainte, résultant des actions de l'employeur. Par conséquent, la rupture est imputable à l'employeur.
Cette décision diverge fondamentalement de la position de la Cour de cassation française, qui considère la résiliation de contrat (tout comme la prise d'acte) comme une initiative du salarié, excluant ainsi la prise en charge par l'AGS des indemnités. Il s’agit désormais d’attendre les prochains arrêts de la Cour de cassation à ce sujet.