Une preuve obtenue de manière déloyale peut être utilisée pour justifier un licenciement, sous conditions


Par deux arrêts du 22 décembre 2023, l’Assemblée plénière de la Cour de cassation a considéré que des preuves obtenues par un employeur par des procédés déloyaux ne doivent pas être directement écartées. Les juges du fond doivent effectuer une appréciation proportionnelle entre le caractère déloyal d’une preuve et les droits fondamentaux de la partie adverse (vie privée, égalité des armes etc.). Le droit à la preuve peut désormais justifier la production d’éléments portant atteinte à d’autres droits.

Dans la première affaire (n°20-20.648), un salarié contestait son licenciement pour faute grave. Afin de justifier le licenciement, l’employeur a soumis au juge un enregistrement sonore réalisé à l’insu du salarié. La Cour a ici admis que des moyens de preuve déloyaux peuvent être présentés au juge, dès lors qu’ils sont indispensables à l’exercice des droits du justiciable.

Dans la seconde affaire (n°21-11.330), un salarié qui avait pris ses congés a été remplacé par un intérimaire qui a utilisé son poste informatique. Le salarié avait laissé son compte Facebook ouvert, permettant à l’intérimaire de prendre connaissance d’une conversation personnelle dans laquelle le salarié sous-entendait que la promotion dont avait bénéficié l’intérimaire était liée à son orientation sexuelle et à celle de son supérieur hiérarchique. L’intérimaire a transmis la conversation a son employeur et le salarié en congé a été licencié pour faute grave. Le salarié a contesté son licenciement. La Cour de cassation considère que les juges n’avaient pas à s’interroger sur la valeur de la preuve provenant de la messagerie Facebook. Les propos échangés par le salarié avec l’un de ses collègues sur la messagerie Facebook constituent une conversation privée qui n’avait pas vocation à être rendue publique et ne pouvait s’analyser, en l’absence d’autres éléments, en un manquement du salarié aux obligations découlant de son contrat de travail, seule possibilité pour licencier un salarié pour un motif en lien avec sa vie privée.