Congés payés et maladie : la CJUE vient préciser la période de report des congés payés en l’absence de dispositions nationales


Ce jeudi 9 novembre 2023, la Cour de Justice de l’Union Européenne (« CJUE ») s’est prononcée sur la période de report des congés payés (affaires C-271/22, C-272/22, C-273/22, C-274/22 et C-275/22).
 
Ces arrêts très attendus font suite à cinq demandes préjudicielles introduites par le conseil de prud’hommes (« CPH ») d’Agen sur l’interprétation de l’article 7 de la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003 et l’article 31 paragraphe 2 de la charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne. 
 
Dans ces affaires, l’employeur avait refusé à ses salariés le bénéfice de jours de congés acquis lors d’arrêts de travail pour maladie supérieurs à un an et de leur verser, après la fin de leur relation de travail, l’indemnité financière pour congé non pris. Moins de quinze mois après la fin de la période de référence d’un an ouvrant droit aux congés annuels payés, les salariés et ex-salariés ont introduit, sur le fondement du droit européen, différentes demandes sur leurs droits acquis lors de deux périodes de référence consécutives. 
 
Le CPH a alors soumis à la CJUE les questions préjudicielles suivantes :  

1. La directive 20003/88 est-elle d’application directe dans les rapports entre un opérateur privé disposant d’une délégation de service public et ses salariés ? 
La CJUE a répondu que l’article 31, § 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne et l’article 7 de la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003, doivent être interprétés en ce sens qu’un travailleur peut se prévaloir du droit au congé annuel payé à l’égard de son employeur, la circonstance que celui-ci est une entreprise privée, titulaire d’une délégation de service public, étant dépourvue de pertinence à cet égard.

2. Quelle est la durée de report raisonnable des quatre semaines de congés payés acquis, en présence d’une période d’acquisition des droits à congés payés d’une année ? 
La CJUE s’est déclarée incompétente pour définir la durée de report du droit au congé annuel payé, cette question étant du ressort de chaque Etat membre.
 
3. Enfin, en l’absence de disposition nationale réglementaire ou conventionnelle délimitant ledit report, l’application d’un délai de report illimité est-il conformé au droit de l’Union Européenne ? 
A cette question, dont la réponse était très attendue, la CJUE a répondu que l’article 7 de la directive 2003/88 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une législation nationale et/ou à une pratique nationale qui, en l’absence de disposition nationale prévoyant une limite temporelle expresse au report de droits à congé annuel payé acquis et non exercés en raison d’un arrêt de travail pour maladie de longue durée, permet de faire droit à des demandes de congé annuel payé introduites par un travailleur moins de 15 mois après la fin de la période de référence ouvrant droit à ce congé et limitées à deux périodes de référence consécutives.