Les juges doivent s’en tenir aux motifs évoqués dans la lettre de licenciement, même en cas de suspicion de licenciement pour dénonciation de faits de harcèlement sexuel
Dans un arrêt du le 18 octobre 2023 (n°22-18.678), publié au bulletin et aux lettres de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation a rappelé l’importance des motifs évoqués dans la lettre de licenciement lors d’un litige.
Il était question en l’espèce d’une salariée qui avait porté plainte pour des faits de harcèlement sexuel sur son lieu de travail. Quelques temps plus tard, la salariée se fit notifier son licenciement pour faute grave, qu’elle contesta aussitôt devant la juridiction prud’homale, invoquant un licenciement nul car résultant de la seule dénonciation du harcèlement sexuel. La cour d’appel saisie de ce litige admis la nullité du licenciement au motif que les faits reprochés à la salariée au sein de la lettre de licenciement étaient concomitants à la date à laquelle elle avait déposé sa plainte, ce dont la cour déduit que la dénonciation de harcèlement sexuel a nécessairement pesé sur la décision de licenciement, sans que l’employeur n’établisse que cette dénonciation ait été faite de mauvaise foi.
La Cour de cassation écarte l’interprétation de la cour d’appel, en lui reprochant de ne pas avoir tiré les conséquences légales de l’absence de mention de la dénonciation de faits de harcèlement sexuel au sein de la lettre de licenciement. La Cour de cassation renvoie ainsi l’affaire devant une nouvelle cour d’appel et invite les juges à rechercher si les motifs énoncés par la lettre de licenciement pour caractériser la faute grave sont établis par l’employeur. Par cet arrêt, la Haute juridiction rappelle son application stricte des articles L.1152-2, L.1152-3 et L.1154-1 du code du travail selon lesquels lorsque les faits invoqués dans la lettre de licenciement caractérisent une cause réelle et sérieuse de licenciement, il appartient au salarié de démontrer que la rupture de son contrat de travail constitue une mesure de rétorsion à une plainte pour harcèlement moral ou sexuel. Dans le cas contraire, il appartient à l'employeur de démontrer l'absence de lien entre la dénonciation par le salarié d'agissements de harcèlement moral ou sexuel et son licenciement.